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La villa gallo-romaine de Noyon
18 septembre 2010

Diagnostic dans le suburbium de Noviomagus-Noyon

Traversant le Noyonnais du nord au sud sur 75 hectares, le diagnostic de la Zone Prioritaire 3 a mis en évidence une occupation et une valorisation de ce terroir depuis au moins la Protohistoire ancienne. Si cinq secteurs positifs peuvent être définis en tant que site, l’ensemble de la ZP 3 peut être considérée dans son ensemble comme un tissu archéologique et historique continu.


L’intérêt principal de cette opération d’envergure aux portes de Noyon est de documenter et d’éclaircir les origines de la cité, toujours nébuleuses, ainsi
que d’apporter de nouvelles données sur la période charnière et décisive qu’est l’Antiquité tardive dans ce secteur de la Picardie.

Couverture Noyon suburbium

 



 

Notice scientifique


Dans le cadre des opérations préalables à la création du Canal-Seine-Nord-Europe, un diagnostic a été réalisé de novembre 2009 à mars 2010 entre les points kilométriques 19 et 24,5 du futur ouvrage, formant la « zone prioritaire 3 ». Comprenant deux bassins de retournement et une écluse, la ZP 3 s’étend sur les communes de Beaurains-lès-Noyon, Porquéricourt, Vauchelles et Noyon, soit une superficie de 75 hectares.


Traversant le Noyonnais du nord au sud, le tracé de la ZP 3 se positionne, à Beaurains et Porquéricourt, perpendiculairement à une série de reliefs érodés et de vallons colmatés. À Vauchelles et dans la « Plaine d’Orchies » de Noyon, un long et faible versant de butte témoin, il rompt également une série de
cours d’eau canalisés avant de s’engager sur la pente du « Maigremont » et d’arriver sur les terrains alluvionnaires de « La Maladrerie » et du « Poncelet », peu avant la confluence du canal du Nord avec l’Oise et son canal latéral à Pont-l’Évêque.


Le diagnostic a mis au jour, sur l’ensemble de l’emprise étudiée, les vestiges des parcellaires et des activités agricoles modernes et contemporaines, terroir validé par les documents cadastraux. Les stigmates de la Première Guerre mondiale ont également été repérés à Noyon, se densifiant à l’approche de la route de Compiègne et du Mont-Renaud. Deux sites de briqueteries ont été traversés et plusieurs éléments industriels repérés régulièrement lors de l’avancement de l’opération, parfois en relation avec la construction du canal du Nord.


Les périodes anciennes sont représentées par deux sites bien circonscrits. À « la Sole », à Porquéricourt, il s’agit d’un enclos annulaire de 70 m de diamètre, qui paraît indigent en structures satellites et qui n’a pu être précisément daté. Un deuxième site protohistorique lato sensu, aux « longues Raies », est constitué par deux structures de combustion dont une avec un radier de blocs de grès. Si aucune trace d’habitat n’a été détectée, leur environnement à livré de nombreux nodules de torchis rubéfié. La topographie de ce site, positionné sur une avancée de plateau, est aussi marquée par deux structures linéaires au nord et au sud, un ancien ruisseau et un fossé, à égales distances des foyers.


L’Antiquité, période la mieux représentée sur la carte archéologique, est effectivement présente sur l’ensemble de la ZP 3 , ne serait-ce qu’au travers du 10 Inrap · Rapport de diagnostic Canal Seine - Nord Europe, ZP 3, Picardie, Oise, Beaurains-lès-Noyon, Noyon, Passel, Pont-l’Évêque, Porquéricourt, Vauchelles contexte du suburbium de Noyon et de sa position par rapport à la Via Agrippa. Le premier indice de site antique est localisé à Beaurains. Il s’agit des abords d’un paléochenal, à proximité immédiate de son franchissement par la voie romaine. Les horizons anciens ont pu être datés par de la céramique locale de la période julio-claudienne. Ils contenaient aussi des restes d’animaux de trait.


La présomption d’un important site sur le versant du Maigremont, au lieu-dit « la Fontaine à Canards » s’est trouvé confortée par l’opération. Ce sont les deux probables ailes de la pars agricola d’une grande villa qui ont été mises en évidence avec deux états bien datés et se déployant avec la même orientation dans le même espace. Plusieurs signes de romanisation précoce et de céramique n’appartenant pas à des circuits commerciaux plaident pour l’installation d’individus originaires des secteurs éduen ou ségusiave dans les années -20 / -15. L’occupation reste bien marquée durant toute la période julio-claudienne. L’établissement paraît alors constitué d’un ensemble d’édifices en matériaux légers orientés est-ouest, et longés par une voie secondaire au nord. S’ensuit une phase monumentale qui paraît s’échelonner durant la seconde moitié du ier siècle. Deux alignements parallèles constitués d’édifices en dur, de clôtures et de cours, sont distants l’un de l’autre de 160 m. Si les fonctions de ces édifices en dur ne sont pas définies, il
reste que de nombreuses traces de rejets domestiques ont été détectées ainsi que des aménagements liés à une activité de service dans leur environnement : fours et autres structures de combustion, dépotoirs, cours. Vraisemblablement, les édifices résidentiels sont en dehors de l’emprise, vers l’ouest. Un diagnostic de 2008 du Service archéologique de la Ville de Noyon y avait mis au jour un système d’adduction d’eau et de distribution. Ces données renseignent ainsi, au moins, sur la position d’éventuelles installations balnéaires souvent associées à la pars urbana. Le castellum du système hydraulique est localisé à 280 m du mur supposé séparer les deux parties de la villa.


Compte tenu des dimensions observées en diagnostic, cette distance reste à l’échelle du site. La topographie présente également un petit replat en hauteur à la cote 65. La surface de ce secteur est saturée de fragments de tuiles gallo-romaines, de céramiques et de moellons. Positionné dans l’axe des vestiges observés, il pourrait être l’emplacement du logis domanial. Si la fin du IIe siècle et la première moitié du IIIe siècle semble être une longue phase bien moins florissante, une présence reste toutefois perceptible sur ce site. Il semblerait que ce soit durant cette période que les démolitions aient été faites.


Un ensemble funéraire des IVe - Ve siècle a été mis au jour à proximité immédiate de l’aile Sud de la villa, et non loin du site d’une nécropole gallo-romaine mentionné en 1913 à l’emplacement de l’écluse du canal du Nord. Ce site consiste en un enclos de plan quadrangulaire de 12,50 m sur 6 m orienté suivant les points cardinaux entourant un foyer et une grande fosse, datée du règne de Valentinien Ier. Également au centre, y a été découverte la sépulture d’un enfant de moins de 8 ans, tête au nord, accompagné de sa parure vestimentaire, une boucle de ceinture en fer non décorée et une épingle à chas et tête carrée en bronze, dans leur position d’usage. Un couteau à virole, pointe à l’est, était déposé sur le thorax. Une seconde sépulture a été découverte parallèlement à la première, sur son côté ouest. Sa fosse aux parois verticales a été creusée dans le comblement de la grande fosse centrée du ive siècle. Le squelette, également tête au nord, est celui d’un individu âgé dont le sexe n’a pu être déterminé. Le radius et l’humérus gauche étaient entourés par un bracelet en fer très fin. Une fibule en fer reposait sur la clavicule et l’omoplate gauches. Une centaine de perles en verre noir étiré formait un large collier autour des vertèbres cervicales et sous la tête basculée, près de laquelle, dans le sédiment, deux monnaies rognées de Valentinien III ont été découvertes. Si les objets contenus dans les sépultures restent à étudier de manière approfondie, un premier aperçu dans le cadre du diagnostic permet de poser prudemment quelques pistes vers des typologies transrhénanes. L’orientation nord-sud des deux sépultures est admise pour la période, suggérée par les monnaies, comme étant de tradition germanique, importée par des soldats ou des colons. Avec toute la prudence qui s’impose au regard du caractère exceptionnel de la période de cet ensemble (fin du IVe - première moitié du Ve siècle), le rapprochement avec les données de la Notitia Dignitatum Imperii doit être fait, Noyon étant connue par les sources pour être la résidence du préfet des lètes bataves.


Un site du second Moyen Âge et du XVIe siècle a été repéré à « la Hotte » entre l’ancien chemin d’Orchies et le ruisseau de Maigremont. Il est constitué d’un parcellaire agricole en lanière et d’un secteur où se concentre une occupation qui n’a pu être clairement précisée lors du diagnostic. Si aucun plan d’édifice n’a pu être déterminé malgré la présence de quelques trous de poteau, des structures annexes comme un puits ou des dépotoirs ont livré des nodules de torchis, indices de construction. L’habitat n’est pas avéré, mais la présence de scories suggère une activité métallurgique.

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